Delphine Levy

Caboche

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Un jour j'ai été frappée par mon crâne. Il m'est tombé dessus au détour de vieux souvenirs. Je feuilletais mes vieux dessins d'enfant. Et il y a eu cette grande enveloppe qui contenait des radiographies de mon crâne. J'ai d'abord été surprise. Pourquoi avait-on fait ça à ma tête ? Et puis j'ai été séduite. Cette photo de moi me plaisait. Je ne l'ai pas trouvée morbide. J'ai aimé cette image de moi. Car je me suis vu sur cette image. Et je l'ai trouvée juste.

Ça faisait déjà quelque temps que j'avais pris l'habitude de me photographier régulièrement. Peu importait l'appareil : numérique, argentique, compact, reflexe Ce que j'avais sous la main. Ce qui correspondait à mon humeur. Comme un journal intime photographique. L'idée n'était pas de montrer ce à quoi je pensais. L'idée était de me monter moi. Voilà ce que j'étais à cet instant-là. Voilà qui j'étais. Qui je suis. Comme une nécessité de m'exposer à moi-même. Violemment. Frontalement. Jamais je n'ai prémédité ces prises de vues. D'un coup, je ressentais comme une urgence d'exister. Et je me prenais en photo. Très vite. Sans mise en scène. Juste moi.

Et je suis tombée sur ces radiographies. Le profil de mon crâne. Mon os frontal, mes maxillaires, l'orbite de mon oeil, mon arcade zygomatique, mon os temporal, occipital, pariétal, mes vertèbres cervicales. Tout y était. Rien ne manquait. J'étais là. Je pouvais même apercevoir le profil de mon nez, mes lèvres et mon menton. J'étais troublée par cette image. Je la trouvais belle. Esthétiquement. Plastiquement. Et surtout, j'étais happée par l'image de ma boite crânienne. Immense. Claire et sombre à la fois. Dense. Confuse. Je me tenais face à une terre inconnue. J'ai d'abord eu envie de la remplir de dessins. D'y mettre mon humeur du jour. Comme pour mes autoportraits. Un dessin naïf. Comme ceux que je faisais enfant. Et aussi de la recouvrir de lignes, de courbes. Comme un dessin mathématique. Ma tête était pleine de sentiments et enclavée par la raison.

Le temps a passé.

La radio était toujours accrochée à un mur de mon appartement. Je suis passé devant comme souvent. Et c'est venu à moi. Sans préméditation, comme toujours. J'ai voulu mettre ma tête faite de chair et de sang et de cheveux, à l'intérieur de mon crâne. J'ai fermé les yeux et j'ai pris mon profil en photo. J'ai fermé les yeux parce que je ne voulais pas regarder l'extérieur. Je voulais regarder en moi. La série des superpositions a été faite le même jour. Il y a différentes propositions. Je ne sais pas laquelle est la plus juste. Je me sens tout ça à la fois. Sombre, lumineuse, floue, cernée, opaque, dense, évasive, sereine, grave, ludique. Et chacune de ces images est tout ça à la fois.

 
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